jeudi 21 juillet 2011

Live report : Main Square Festival 2 & 3/07/11

On ne va remettre des tartines d'historique concernant le festival arrageois au passé controversé et tumultueux. A force de pousser le loup (la multinationale Live Nation ) dans la bergerie (le cercle nombriliste des festivals français), France Leduc a vu son bébé se retourner contre elle : c'est à quelques jours de l'édition précédente qu'a eu lieu la douloureuse séparation entre la lilloise et ses copains internationaux.


2011 devient donc la première année sans FLP et donc sous les seules commandes de Live Nation. L'occasion pour le Main Square d'intégrer une nouvelle dimension, mais surtout de devenir un vrai festival grâce à un deuxième scène agrandie, utilisée notamment lors de concerts d'Angus Young et Cie. Cerise sur le gâteau (doré) : le soleil nous aura rendu visite lors de nos deux jours de festivités.

Retour sur un week-end transpirant de décibels où nous étions, bizarrement, loin d'être les seuls à avoir eu la curiosité de venir.


Faut dire que 100 000 personnes sur 3 jours, ça fait beaucoup. Financièrement, c'est du bonheur. Mais, concrètement, c'est dur à vivre et on vous cache pas qu'on s'est sentis plusieurs fois sardine dimanche vers 21h30 pour rejoindre la grande scène où se produisait Portishead (frissons).

Une journée record en terme de fréquentation (40 000, qui dit mieux?!) où le Main Square retrouvait ceux qui illuminé l'édition 2009, Coldplay. Fini l'avancée de scène, fini la joie communicative de son leader charismatique, Chris Martin. Les nouveaux Coldplay sont à l'image de leur nouveau single, Every Teardrop Is A Waterfall: monotones, prévisibles et sans prise de risque. On aura eu l'impression de glisser pendant 1h30 sur une coquille d'oeuf, le genre de surface lisse qui n'accroche pas et qui vous laisse glisser et fermer les yeux sans jamais vous réveiller. Il faut dire que le groupe se repose sur ses acquis et sa notoriété, quitte à foutre en l'air l'intro d'In My Place, une honte pour un groupe de ce calibre.


A l'inverse, Puggy est en pleine ascension, un succès mérité autant à l'efficacité des morceaux de leur album, Something You Might Like, qu'à la qualité de leur interprétation sur scène. Le trio, qu'on pourrait qualifier d'européen (un suédois, un français et un anglais expatriés en Belgique une fois), a fait un bon bout de chemin depuis leur showcase au Furet du Nord le 18 sept 2010 et ce sont bien des musiciens et non des simples interprètes que l'on retrouve sur scène ce dimanche. Leur assurance ne fait qu'augmenter la puissance de leur set et l'ambiance devient électrique sur When You Know.

Il faut dire que la Sting Junior, Coco Sumner avait préparé le terrain une heure plus tôt avec son groupe I Blame Coco : c'est en mêlant sincérité et professionnalisme qu'on obtient le meilleur lien avec le public. Si les valeurs sûres n'ont pas déçu (Elbow et Cold War Kids en première ligne), il fallait arriver tôt pour apprécier le son 70's à souhait des étonnants Rival Sons : dopés au Led Zep, la taille de la grande scène n'était pas de trop pour ce futur groupe de stade dont les membres sont nés 30 ans trop tard.


Gardons le meilleur pour la fin, je parle bien évidemment de la journée du samedi dont la programmation rendrait jaloux n'importe quel bon festival d'outre-manche. Réunir Kaiser Chiefs, The National, Kasabian, White Lies et Two Door Cinema Club et Fleet Foxes relève de l'exploit chez les rosbifs quand, ici, cela peut même paraître faible. Cherchez l'erreur.

Se fut donc un marathon musical dont le coup d'envoi fut donné par les infatigables mangeurs de frites de Triggerfinger : toujours plus pros, toujours plus fous, toujours plus efficace.

Avant l'inégale prestation du noir qui veut un dollar, la confirmation de la journée vient de la Green Room où se produisait pour la toute première fois dans notre région (enfin!) les Everything Everything, discrète mais non moins machine à tube anglaise.


Un festival sans choix cruciaux ne serait pas un festival. Les dilemmes provenant d'incohérence dans vos goûts musicaux sont les plus douloureux. Ainsi, c'est la main sur le coeur en chantant God Save The Queen que nous avons rejoint la grande scène pour les performers de Kaiser Chiefs, laissant derrière nous les harmonies des rares Fleet Foxes.

Et quand les horaires opposent The National + Arcade Fire contre les has bene Jimmy Eat World + TDCC, le choix est (très) vite fait. La première salve de nom implore le respect. Que ce soit Matt Berninger ou Win Butler et leurs copains respectifs, l'accueil et l'écoute sont les mêmes.

Les Canadiens de la soirée prouvent qu'ils méritent le place de headliner grâce à un décor, une setlist et une présence frôlant la perfection. Tandis que les vieilles briques des bâtiments de la Citadelle versent une larme, le soleil, bercé par ces enchainements de notes qui viennent caresser l'oreille, se couche, serein.


C'est avec une souplesse sans précédent qu'on fait le grand-écart musical permettant de finir la soirée. Tandis que les Kasabian jouent comme à la maison et gagnent le titre de meilleure ambiance du festival pour sûr, les Shoes rivalisent ouvertement et sans complexe ("va bouffer du quinoa et arrête de nous faire chier", "dégage, arrête de jouer") avec le populaire Moby. Le duo rémois, quatuor sur scène avec l'utile ajout de 2 percussionnistes répondant au nom de Das Galliano, auront marqué les esprits (fatigués) à coup de pépites tudesques. On aurait autant apprécié qu'au Grand Mix un mois plus tôt si la SNCF ne nous avait pas obligé de quitter le site à la moitié du set.

Si le Main Square Festival s'impose aujourd'hui comme un sérieux concurrent des Eurockéennes de Belfort, la différence d'âge se fait pourtant sentir.

Live report : Dour 14&15&16&17/07




Tout bon mélomane qui se respecte, qu'il soit trentenaire averti ou adolescent novice, se souvient forcément du moment où il a appris la venue de Pulp à Dour, 7 ans et 5 jours après leur première et unique venue, où le déchirant Underwear avait été joué pour la toute première fois, alors que les lyrics n'étaient même pas encore terminées, selon les dires de Sir Jarvis Cocker cette fois-ci.
Que ce soit dans son fil d'actualité faceboukien (un certain 21 mars à 21h01, via un statut pour le moins évocateur "COMMON PEOPLE!") ou par un bouche à oreille efficace, la nouvelle a fait l'effet une bombe pour tous les nostalgiques ou frustrés de ne pas avoir connu les grandes heures de la britpop.
Au final, l'heure quinze subtilement axée sur l'album Different Class se sera révélée comme le meilleur concert de l'année pour sûr, notamment grâce à des interprétations fidèles des nombreux tubes de leur répertoire. Un pas dans le passé, l'autre dans le présent et avant tout beaucoup d'émotion, surtout lorsque Jarvis s'empare de sa 12 cordes pour entonner Something Changed qui n'a, pour le coup, pas changé et rien perdu de sa superbe.
Le lighstshow et les décors subliment le spectacle, l'addition des talonnettes et du déhanché du leader donnent des frissons... on ne peut rester insensible à l'énergie des anglais qui ont prouvé, d'un Do You Remember The First Time ? bluffant jusqu'à un Common People dantesque, qu'ils ne sont pas revenus pour se remplir les poches mais bien pour communier avec leur public et rappeler avec majestuosité les règles de la vraie pop music.

Une Last Arena agrandie, de la boue en veux-tu en voilà et des records d'affluence autant sur le camping (35 000 aventuriers, devant Glastonbury) que sur le site (160 000, qui dit mieux?!), voilà ce qui restera dans les grandes lignes de ce Dour 2011.


On aurait pu s'éterniser sur, en vrac, la vulgarité des Cypress Hill, la mauvaise qualité du son dans les 5 chapiteaux, les problèmes d'organisation au Liddle du coin pour le ravitaillement, le joli quiproquo entre les Do et leur public le vendredi sur la Club Circuit Marquee, le parasite que fut le chapiteau dubstepien De Balzaal lors de concerts doux sur la Last Arena, la superficialité des bordelais de Kap Bambino, l'inutilité du set foutraque des Stupeflip, le manque de communication autant entre les membres de Kyuss qu'avec leur public ou même sur le budget pour simplement se nourrir, le manque d'indications, le temps (au rendez-vous un jours sur quatre)...


Mais non, ne retenons que le meilleur, et nous avons en tête d'ailleurs plus de bons que de mauvais souvenirs.
Pour faire court, il y aura eu de belles confirmations, à commencer par les quatre québécois de Duchess Says : soutenue par un trio électro pop décapant basse-clavier-batterie, la belle Annie-Claude passe une bonne partie du set dans la fosse, mélangeant calins et bousculades.

Tim Harrington, leader à bide kronenbourg des Savy Fav, lui, partage la même attitude que notre duchesse mais opte plutôt pour la deuxième activité. Rentre-dedans, le groupe new-yorkais aura aussi marqué les esprits.. et les oreilles. Tout comme les Terror dont le nom se passe de commentaire tellement il reflète parfaitement l'esprit du groupe. Ce fut notre seul et unique passage par la Cannibal Stage, mais on s'en souviendra.

Dans la série "on avait misé dessus et on a bien fait", les australiens de Cloud Control, repérés au Rock dans tous ses Etats et aidés ce samedi par un lâché de ballons spontané du public, les nationaux de Great Mountain Fire ou encore les trois flamands de Sx (à prononcer "sex", et oui) qui nous ont hypnotisé en début d'après-midi le dimanche à coup d'indiepop forte en clavier et sincère.


Quelques bons moments sortent du lot aussi, comme l'assurance des Bewitched Hands, la marre de mains lors des prestations mémorables d'Ice Cube et des mythiques Public Enemy, l'enthousiasme du leader des Das Pop, l'accueil fou réservé aux Foals, le rappel (le seul du festival!) improvisé des triomphales CocoRosie, l'énergie du supergroupe 13&God qui rassemble des membres de The Notwist et de Themselves, le transfert imprévu mais apprécié des I'm From Barcelona sur la Last Arena, le carton plein de l'allemand Boys Noize au Dance Hall la première nuit, les harmonies des Syd Matters, le striptease d'une fan onstage pendant les Vismets...
Mentions spéciales à la Hoegaarden Rosée et au concert final des Bonaparte, à mi chemin entre le concert purement musical et le cabaret, toujours aussi bon.


Dour, c'est fatiguant, il y a clairement à boire et à manger mais Dour rassemble en 4 jours+nuits l'essentiel et le meilleur des groupes tournant sur l'été. Chaque année c'est le même épuisement le lundi matin une fois rentré mais c'est aussi la même satisfaction.
Et cette fois-ci, la satisfaction était encore plus grande que d'habitude.. Rendez-vous les 12, 13, 14 & 15 juillet 2012 pour une 24ème édition qui, on l'espère, sera à la même hauteur !



Live report : le Rock dans tous ses Etats 24&25/06

Nous ne sommes pas du genre à se fier à la première impression et aux apparences mais quand même. Une queue interminable empêchant de voir Dark Dark Dark et Fool's Gold, des vigiles omniprésents et oppressants : voilà les images qu'on garde en tête de notre arrivée au Rock dans Tous ses Etats 2011. L'excuse du rodage nécessaire aux premiers pas d'un festival aurait marché si Evreux n'accueillait pas cette année le festival pour la… 28ème fois.


Nous n'aurons pas non plus vu le prince de la pop francophone Alister dont la prestation ne se résumera qu'à un fond musical plutôt agréable pour planter la tente sur l'hippodrome. Car, il faut l'avouer, la proximité et la cadre verdoyant ne sont pas pour déplaire dans ce festival à taille humaine. Ainsi, c'est dans une ambiance familiale où se mélangent prépubères, mélomanes et même personnes âgées que les concerts se déroulent deux jours durant en alternance entre deux scènes qui se font face.


Au niveau de la programmation, les prises de risques, le point de fort de ce festival normand, dues au défrichage musical (notons quand même le flair des programmateurs par la présence des australiens de Cloud Control) sont compensées par des poids lourds de la scène d'hier (Skunk Anansie, toujours aussi près des étoiles) et d'aujourd'hui (Gaetan Roussel, et ses "clap" à la limite du supportable).

L'éclectisme est aussi une particularité du RDTSE, de l'électro agressif (qui l'est encore plus lorsque qu'il est programmé en début de soirée avec les Atari Teenage Riot le samedi) à la pop lunaire et majestueuse de Dan Bejar et ses Destroyer, en passant par le hip hop ricain des No Surrender ou de Blake Worrel.

En parallèle, la scène locale est loin d'être mise de côté. Locale, peut-être, mais pas bancale : ce week-end aura été l'occasion pour les Concrete Knives de faire de nouveaux adeptes (dont l'infatigable Skin qui aura, au détour d'un tweet, confié avoir flashé sur nos saint-lois préférés) ou pour les Christine, duo surprise du festival qui auront montré, grâce à trois set remarqués, que l'électro est bel et bien une spécialité française.


Et si l'on devait ne retenir que trois prestations sur les deux délicieux jours de concerts, alors notre choix se porterait sur des belges fous, une légende toujours au top et un duo de chez nous.

Tout d'abord, les Experimental Tropic Blues Band qui auront tout donné en ouverture le vendredi : tout en prenant l'autoroute du rockabilly, le trio multiplie les folies comme ce final dantesque, micro dans le caleçon.


La légende répond au nom de Jello Biafra et trente ans après avoir marqué l'histoire du punk avec les Dead Kennedys, il continue de retourner chaque ville où il se produit et se sert de ses titres comme arme de revendication. Au final, une claque puissante de celle qui vous marque pendant plusieurs heures après la fin du spectacle, le tout forcément à des années lumières du politiquement correct.


Enfin, Inspector Cluzo et son blues ravageur from Mont-de-Marsan : injustement boudés par la presse musicale de l'hexagone, c'est en Asie qu'ils continuent de cartonner. Le petit plus de leur prestation à Evreux, au delà de l'ambiance électrique mais bon enfant, aura été la présence de cuivres assurée par leurs "mates".


Si Glastonbury reste da place to be le dernier week-end de juin, le Rock dans Tous ses Etats n'est pas très loin derrière.


mardi 12 juillet 2011

Compilation Tip-Toe #3 : Holika & The Day Life

Que vous preniez le temps de découvrir, voilà le défi -on l'espère- relevé avec les deux premières compilations Tip-Toe.
Ca parait simple sur le papier, et pourtant : à l'heure où quelques clics et commentaires éphémères suffisent à la blogosphère pour s'emballer et créer le buzz autour d'un groupe quelques heures auparavant inconnu, le web 2.0 peut mettre dans la lumière des banlieusards à la vie ennuyeuse comme nourrir de faux espoirs. Au final, les mêmes groupes monopolisent les mêmes magazines se disant "défricheurs" et la notion de découverte n'est paradoxalement pas développée et se perd.

Ce n'est pas pour rien qu'on emploie le verbe "surfer" quand on évoque le monde virtuel. Le choix et la diversité, c'est bien, mais tous les groupes, pourtant placés à la même échelle sur les réseaux sociaux, se valent-ils ?
On ne va pas vous cacher qu'on trouve à boire et à manger quand on s'aventure dans la jungle qu'est Bandcamp après une journée de cours à la recherche de pépites (malheureusement souvent anglophones). Un tri, puis un deuxième, sont clairement indispensables.
Le résultat est, pour la troisième fois consécutive, loin d'être le best-of parfait des sorties récentes mais a pour but de vous proposer une sélection de coups de coeur qui, à nos yeux (et surtout à nos oreilles), devraient atteindre votre sensibilité musicale et sont en mesure de vous toucher, d'une manière ou d'une autre, à un degré plus ou moins fort. On est d'ailleurs toujours curieux de connaitre vos réactions!

Je vous propose ici une courte présentation de deux groupes faisant partie de notre 3ème compilation, tous deux nés l'année dernière. Les plus colorés, les plus "pop", même si cette appellation n'a plus aucune valeur tellement elle résonne de manière différente suivant les goûts de chacun. Mais l'étiquetage est la plus dangereuse des façons de décrire le son d'un groupe puisque les intentions de ce dernier différeront toujours des ressentis du critique.


A ma droite, Holika. Ce trio nous vient de Bournemouth, au sud de l'Angleterre, et propose une folk soignée grâce à la voix à la fois chaude et stellaire de la belle Tori Maries. Leur EP sorti le mois dernier, Desmonstrations, regorge de ballades sans fausse note qui nous embarquent loin des sentiers battus de la folk traditionnelle, en grande partie grâce aux harmoniques impeccables que dégage le guitariste Dorian Meadows.
Des compositions inventives donc, qui s'écoutent sous un ciel étoilé ou à l'aurore, lorsque les lueurs rose-orangées annoncent le lever du soleil. S'ils ne sont pas encore tous les trois sortis de l'université, ils montrent une maturité étonnante qui ne nous fait pas douter une seconde concernant leur avenir musical : ces jeunes anglais ne sont pas des amateurs mais bien des passionnés avant tout, et vous ne pourrez que succomber au charme de Corner Of The Circle, extrait de Demonstrations inclu dans notre 3ème Compilation Tip-Toe.

A ma gauche, The Day Life. Quittons la reine pour aller rendre visite à l'Oncle Sam. Car ces américains valent le détour. Repérés notamment en première partie de Ben Kweller ou encore des Free Energy, l'initiative est d'abord partie de deux amis d'enfance, Alex Markovitz et Jason Oller qui en avaient marre de composer dans leur coin et qui ont eu la brillante idée de mettre leur talent en commun.
Le résultat ne déçoit pas, il étonne même : aidés par le batteur Carl Bahner, ils évoluent avec élégance et classe dans ce qu'ils appellent une "explosion rock intelligente", une pop tantôt déchirante, tantôt entrainante, taillée pour devenir la bande-son d'un film, ou tout du moins d'une vie, d'une journée.. de la vie de tous les jours comme le laisse entendre leur nom.
Originaire de Philadelphie où ils connaissent déjà une belle notoriété, la vague Day Life a déjà atteint la côte est des Etats-Unis, notamment à New-York et Boston. Et si Alex lâche qu'il parle couramment notre langue quand on lui demande s'il détient des liens avec la France, cela ne nous étonne pas : l'irrésistible énergie du trio ne restera par pour longtemps un phénomène américain et la traversée de l'Atlantique est immédiate.
Mais pour commencer, rien de mieux que d'écouter leur Pick Me Up à télécharger gratuitement dans notre compilation!