dimanche 15 mai 2011

Royal Republic @ La Péniche 15/05/2011

Pour la presse généraliste, les Royal Republic sont les nouveaux Hives dopés aux Metallica. Il est vrai, les guitares cinglantes de President's Daughter ou de 21st Century Gentleman montrent qu'il n'y a pas qu'une proximité géographique entre les 2 groupes suédois. Soixantuitards, metalleux, cranes rasés (chauve qui peut!), mères et filles, gamines prépubères.. ils se sont tous réunis à bord de la Péniche. Un public diversifié donc mais qu'importe, ce soir, on a tous 16 ans.

18h30, c'est tôt pour un concert. Mais quand le thermomètre ne dépasse pas les 20 degrès, c'est le meilleur moyen pour se réchauffer. Et ça tombe bien, le quatuor à muscles nous met tout de suite dans le bain avec un enchainement de titres en rafale dont le single accrocheur All Because Of You. Les Royal Republic grimpent alors au sommet d'une montagne d'énergie de laquelle ils ne descendront qu'après un rappel ovationné.
Ils ne nous auront pas laissé pas de répit pendant une heure, montre en main. Il y a l'heure de concert et l'heure de concert : ici, les amplis sont au max, les fûts maltraités et les guitares saignent, tout comme les cordes vocales du charismatique chanteur, Adam Grahn.
Il n'y pas de bouchon sur l'autoroute des Royal Republic, et tant pis si on dépasse les limitations de vitesse (de son?). La machine est en marche, l'alchimie aussi. L'énergie atomisée que dégage le groupe est contagieuse et les premiers rangs n'attendent pas la bombe nommée Tommy Gun pour exploser. Pas besoin de visuel, tout est dans l'énergie et le (gros) son.

Au final, tous les titres de We Are The Royal, le premier effort du groupe, ont une vocation de single interplanétaire pour stades en furie. Les suédois multiplient les choeurs et les 'wohoho' universels. La testostérone est au rendez-vous : le bassiste à la mèche blonde gueule toutes les paroles hors micros tandis que le leader crache ou rote et hurle dans son micro. Le groupe donne et le public rend, que demander de plus ?!
N'oublions pas aussi la touche d'humour, qui fait aussi leur charme, autant en studio que sur scène. Quand ils ne plaisantent pas sur leur (soit-disante) virginité ou sur le public, le boys band from Malmö nous étonne avec des paroles subtilement satiriques, non loin de concurrencer une fois de plus leurs concitoyens Hives.
Professionnalisme, efficacité, humour : voilà les 3 grandes qualités de ce jeune groupe à qui l'avenir sourit. Mieux que du speed, plus efficace que de la vodka pure et pourtant pas nocive : la nouvelle drogue du moment répond au nom de Royal Republic.

Et pourtant, la salle n'était pas très remplie ce soir (la faute à un report trop discret d'une date prévue 2 mois plus tôt?). Morale : qui dit petit public ne dit pas petite ambiance et ne dit pas pas petit concert !

samedi 7 mai 2011

ITW Bonaparte (+ Live report)



On connaissait le personnage Bonaparte et sa Bonaparty sur scène et on était curieux de découvrir l'homme, Tobias Jundt. On ne fut pas déçu. Entretien avec l'un des musiciens les plus créatifs du moment à l'occasion du passage lillois de son cirque musical.

Lille sous la pluie, ça vous inspire ?
C'est un peu comme Berlin en hiver. Je voulais vraiment aller dans le Vieux-Lille parce que, maintenant qu'on tourne en France, j'aimerais visiter aussi les villes où l'on joue. J'étais à Strasbourg hier, et la ville est incroyable, presque "trop" jolie. Pour aujourd'hui, j'avais préparé le plan mais j'ai pas eu le temps : balance, interview.. c'est à cause de vous en fait ! (rires) Du coup je n'ai vu que l'Aéronef : je me suis réveillé dans le bus, j'ai traversé la rue, je suis entré dans la salle pour n'en sortir que vers 1h du matin, après le concert de ce soir.

C'est la fin du mois d'avril, qui a rimé pour vous avec grande tournée. Est-ce que la routine s'est installée ?
Oui, on a fait Allemagne, Autriche, Suisse, Russie, tous des pays où on est hyper connus. Concernant la routine, on la sent par exemple en Russie, où le pays est immense : on prend l'avion tous les jours pour aller d'une ville à une autre et c'est assez bizarre.. le vol, je comprends comment c'est possible mais ça marche et même chose pour les changements d'heure à l'intérieur même du pays (grimace). En Europe, la routine est différente avec le bus parce que tous les jours on voit des paysages et des gens différents, mais le voyage est moins dur. La vie de tournée est très programmée en fait, et ce n'est pas le même rythme que quand je prépare un album parce que quand je suis en studio il n'y a pas de nuit/jour, je suis dedans tout le temps, je me fous du jour de la semaine ou de l'heure qu'il est.

Et avec ce rythmé de tournée, comment gardez-vous la même pêche chaque soir pour vos concerts, qui sont de véritables spectacles ?
On nous pose souvent cette question mais pour moi, il faut de l'énergie pour aller travailler chaque jour dans un bureau mais monter sur scène pour trouver la limite de nos capacités physiques, c'est intéressant. C'est le même principe dans le sport, si je veux gagner mon match, je dois tout donner. Je traverse pas le monde juste pour jouer comme ça (mimiques d'un guitariste dépressif). Non, je joue ce soir, maintenant, donc je donne tout. Et s'il y a un lendemain, et bien je donne encore une fois tout. Et le "tout" change parce que quand on a commencé on jouait une heure et on pensait que c'était le maximum qu'on pouvait faire, et maintenant on arrive à deux. Si aujourd'hui on joue seulement une heure, on se dit qu'il y a un problème. C'est un peu comme la drogue en fait, sauf que là c'est naturel et physique.
La musique est la base de mon existence, c'est ma vie. Mais, quand je pars en tournée, mes amis ne sont pas tous des musiciens donc on fait un show, c'est ce que le public attend aussi. Si on joue pour des aveugles, alors on peut se contenter de ne faire qu'un bon son. Or là on joue pour des gens qui voient, écoutent, bougent, sentent.. c'est "sensuel" en fait.

En live, est-ce qu'on pourrait rapprocher votre univers à celui de The Rocky Horror Picture Show ?
Moi, non. Un jour, une fille est venue chez moi et elle voulait voir ce film. On l'a regardé et ouais, c'est cool, mais ça reste une comédie musicale et on est pas un music-hall. Je vois des fois cette comparaison et il peut y avoir effectivement des parallèles mais ce n'est pas vraiment notre style.

Même au niveau des déguisements ?
A la base, un déguisement, c'est quoi ?! On est tous déguisés en fin de compte. A l'époque où j'ai commencé à Berlin, je suis sortie en tenue baroque pour acheter des croissants et aller au bar. Sur scène on est déguisés, mais au final on est aussi vraiment nus, non seulement physiquement mais aussi parce qu'on a pas peur du ridicule. J'aime pas quand on est réduits à un groupe à déguisements. Mais c'est clair que c'est très important pour moi, quand on se déguise c'est un peu comme le carnaval de Venise.. "je vous vois mais vous ne me voyez pas" (rire démoniaque).

Et pour rentrer dans cet état d'esprit, est-ce qu'il y a une préparation avant de monter sur scène ?
Ouais, on fait un feu dans le backstage, on danse autour et on y jette un sanglier qu'on rôtit et qu'on donne aux clochards. Non, sérieusement, il n'y en a pas vraiment.


A force de tourner, est-ce que vous voyez des différences entre les différents publics suivant les pays ? Est-ce qu'il y en a plus festifs que d'autres ?
Grave. Et là je dois dire que la France, si je fais un classement, est dernière.
En Allemagne, par exemple, même à nos débuts quand on jouait dans des rave à 3h du matin, les gens étaient là et à fond. Aujourd'hui, quand on y joue dans des club de 3000 personnes, c'est le même accueil et c'est fou. On a jamais eu là-bas de sceptiques, de gens qui se disent pendant le concert "ok, on écoute, c'est quoi ça ? Bonaparte mmmm". Non, les gens étaient toujours prêts. En Russie, lors de la première tournée, les gens connaissaient toutes les paroles. Pareil en Roumanie, en Bulgarie.. grâce aux vidéos sur Youtube.
J'adore la France, les gens, la langue, on essaye de jouer le maximum ici et c'est bizarre de voir maintenant des gens qui ne vivent pas à fond le concert. Normalement le groupe et le public font un, mais ici, ça fait deux. Et ça je déteste.. je sais que c'est pas la faute du public, c'est un problème de luxe. A Paris, c'est un peu différent mais hier à Strasbourg, c'était étrange.. les gens étaient froids, même la douche de champagne est mal passée. Et du coup on est sur la réserve.

Et sur scène alors, tout est chronométré ou est-ce qu'il reste une part d'improvisation ?
Au commencement, tout était improvisé, c'était n'importe quoi, le chaos. Maintenant c'est le chaos organisé, c'est plutôt un show. C'est dur pour moi de dire ça parce qu'à la base j'ai un esprit créatif. Quand tu joues tous les soirs, tu n'as pas beaucoup de temps et l'ingé lumières ne peut pas improviser. Mais les réactions du public sont différentes chaque soir.

Le but de Tip-Toe est de dénicher des nouveaux talents. Est-ce que vous pourriez nous citer le noms de groupes que vous avez récemment découverts et que vous aimez ?
Ouais, un groupe de Montpellier, Marvin, une fille avec un synthé. Il faut écouter Siriusmo qui est mon producteur préféré. Il est maintenant sur le label de Modeselektor (Monkeytown Records, ndlr) et il a fait beaucoup de remix pour nous. Housemeister aussi.. c'est des copains en fait à Berlin, avec Boys Noize aussi. A Garorock, j'ai vu Filewile, des suisses, qui ont fait un remix de Bonaparte. Bonaparte aussi, c'est pas mal.. tu connais ?


Le soir, le groupe allemand retourne le Club Aéronef, du sol au plafond. Douches de champagne, de jus de groseille ou de croissants, nonnes alcoolisées, ordinateurs se faisant des fellations.. Bonaparte détourne tous les codes de la société et vient chercher le public, des premiers jusqu'aux derniers rangs. Le fond de la salle, qui aura confirmé la critique que le leader avait faite du public français dans l'après-midi.
Mais qu'importe, devant, on a répondu un grand OUI lorsque le groupe a ouvert avec la chanson Do You Want To Party With The Bonparty ?




Noah & The Whale + Geoff Mendelson @ Aéronef 26/04/2011





Deux concerts (et pas des moindres) étaient proposés en ce mardi soir aux baroudeurs lillois : Noah & The Whale à l'Aéronef et le génie montant de James Blake au Grand Mix. Deux villes, deux univers et surtout deux publics si on se fit à la présence en masse de flamands dans le club de la salle euralilloise.
Vous avez compris, on s'est retournés plusieurs fois le ciboulot avant de faire notre choix et même si l'argument de la proximité a honteusement pesé un poids dans celui-ci, on avait avant tout besoin de pop gentille et apaisante avant l'enchainement fatal de Motorama + Bonaparte des deux soirs suivants.

On sirote notre jus de mange au bar quand Geoff Mendelson, guitare à la main, investit la scène.
Plus qu'un simple songwriter local, ce lillois est un véritable artiste : son talent s'illustre aussi bien sur le plan visuel que musical. Toutes ses productions sont soignées, aussi bien l'album Home Birth réalisé avec son projet expérimental The Elder Threat Block en juin 2009 que le dernier accouchement en date, All Around Someone Else, touchant hommage au mouvement "post-folk" dont il affirme en faire partie.
Cet LP, écoutable sur Bandcamp depuis novembre dernier, mêle élans pop enthousiastes (My Side) et ballades nostalgiques (la fragile mais percutante I Made It All Wrong) et l'artiste prend surtout le risque d'y ajouter les choeurs, violon et clarinette de ses acolytes de The Spasmodic Joy. Le résultat est bluffant, autant accompagné que seul, comme ce soir.
Un silence religieux envahit l'audience et on prête volontiers une oreille, même du côté du bar, au subtil équilibre entre la voix imposante du chanteur et la guitare envoutante du musicien.

Une fois les lumières rallumées, les exclamations de spectateurs surpris de son origine lilloise fusent. Après une ouverture (déjà) remarquée des Wild Beasts il y a un peu plus d'un an dans la même salle, on espère maintenant que le troisième passage à l'Aéronef sera accompagné d'une plus grande médiatisation pour ce jeune lillois discret mais talentueux.


Pas de grande surprise pour la suite de la soirée. Le groupe dont le nom est tiré d'un film de Noah Baumbach a offert une petite heure trente de douceur musicale. Un moment finalement hors espace-temps qui aura permis aux fans et curieux de s'échapper de notre monde instable et craintif pour s'exiler sur une autre planète, découverte en 2008 avec la publication de leur premier album au nom plutôt évocateur, The World Lays Me Down.


Le voyage s'est déroulé sans zone de turbulences à bord d'un aéronef qui ne demandait que ça, et l'atterrissage a été délicieusement orchestré par le Noah & The Whale eux-mêmes avec Blue Skies, deuxième single de The First Days Of Spring (2009), mais surtout ballade rassurante aux choeurs aériens.
Rassurants, c'est une des nombreuses qualités du charismatique Charlie Fink et de son groupe costumé. Leur indie folk est de plus en plus optimiste (le dernier effort ayant un single répondant au nom de L.I.F.E.G.O.E.S.O.N) et contraste ainsi avec la récente vague de groupes défaitistes. Ces londoniens-là, eux, nous enchantent à coups de mélodies jouées au violon ou chantées avec une justesse incomparable.

Les sourires s'affichent clairement sur les visages une fois les lumières rallumées. On voulait rêver et se laisser embarquer, et c'est finalement gagné.